Posté le: Sam Fév 18, 2017 7:31 am Sujet du message: Pssica - Edyr Augusto (Asphalte)
Après Belém et Moscow (dispos en poche en un seul volume chez Points), et Nid de vipères, le Brésilien Edyr Augusto est enfin de retour avec Pssica, son nouveau roman qui vient de paraître chez Asphalte, traduit comme toujours par Diniz Galhos.
Le livre :
De Belém à Cayenne, voyage au bout de l'enfer.
Rejetée par ses parents après la diffusion d'une vidéo intime, Janalice, quatorze ans, est envoyée chez sa tante, dans le centre-ville de Belém.
L'adolescente va se familiariser avec la faune interlope de ses rues : vendeurs à la sauvette, toxicomanes et maquereaux.
Mais sa beauté attire rapidement la convoitise et Janalice finit par se faire kidnapper en pleine rue.
Amadeu, un flic à la retraite, s'empare de l'affaire par amitié pour le père de la jeune fille.
Sur les traces de Janalice, il entame un périple halluciné en Amazonie, à la frontière du Brésil et de la Guyane française.
C'est là que s'entrecroisent toutes sortes de trafics, orpaillage, piraterie fluviale, prostitution infantile et traite des blanches, le tout avec la complicité de l'administration locale.
Mais arrivera-t-il à temps pour sauver Janalice de l'horreur ?
Après Belém, Moscow et Nid de vipères, Edyr Augusto prouve qu'il n'a rien perdu de sa plume nerveuse et sèche. Dans Pssica, il montre Cayenne, capitale d'un territoire français méconnu, sous un jour vertigineux.
À propos des autres titres de l'auteur :
« J’ai rarement lu ça chez un auteur de roman noir, il n’y a que Peace et Ellroy qui arrivent à avoir cette brutalité. » Christophe Laurent, France Bleu
« Moscow fait l’effet d’un violent ressac qu’on se prendrait sur l’arrière du crâne en pensant avoir échappé au pire. » Lucie Eple, Mediapart
« La langue, concise mais hyperbolique, (...) transcrit en peu de pages l’exacerbation d’un malaise civilisationnel. » Paloma Blanchet-Hidalgo, Le Monde
Edyr Augusto est né en 1954 à Belém.
Journaliste et écrivain, il a débuté sa carrière en tant que dramaturge à la fin des années 1970.
Il écrit toujours pour le théâtre et endosse parfois le rôle de metteur en scène.
Edyr a également écrit des recueils de poésie et de chroniques.
Belém, son premier roman, peinture noire de la métropole amazonienne, est paru au Brésil en 1998 et en France en 2013.
Ont suivi Moscow (2014), Nid de vipères (2015) et Pssica (2017), tous publiés chez Asphalte.
Très attaché à sa région, l'État du Pará, au nord du Brésil, Edyr Augusto y ancre tous ses récits.
Il a deux fils, un petit-fils, une compagne qui est actrice et deux chiens.
Passionné de football, il donnerait tout pour devenir joueur professionnel.
_________________ « Il vaut mieux cinq mille lecteurs qui ne vous oublieront plus jamais à des centaines de milliers qui vous auront consommé comme une denrée périssable. » Jérôme Leroy
La pssica, c’est la malédiction.
Et c’est peu dire que les personnages que met en scène Edyr Augusto dans ce roman sont maudits.
Janalice, collégienne envoyée vivre chez sa tante, à Belém, après que ses parents ont découvert qu’une vidéo intime la mettant en scène avec son petit ami a été diffusée sur les réseaux sociaux, est enlevée et tombe entre les mains de trafiquants d’humains.
Manoel Tourinhos a fui l’Angola et a refait sa vie sur une île du delta de l’Amazone jusqu’à ce que des pirates décident de braquer son commerce et mutilent et tuent sa femme.
Preá monte dans la hiérarchie des pirates du delta, mais dans un monde de prédateurs, il est compliqué de garder sa place et son statut.
Amadeu quant à lui, est un policier à la retraite, ami du père de Janalice.
Pour rendre service, il va enquêter sans grande conviction au départ sur sa disparition… jusqu’à ce que son désir de la retrouver finisse par devenir une obsession, au risque de se perdre lui-même.
Comme Edyr Augusto, qui, dès les premières lignes, lance son roman bille en tête, nous n’irons pas par quatre chemins : Pssica est un livre d’une violence extrême, sans temps mort, souvent dérangeant et, si l’on peut regretter une dernière partie sans doute trop vite expédiée, dont la relative brièveté (138 pages auxquelles est adjointe une postface perspicace de Daniel Galera) renforce encore le caractère débridé : « un récit qui ne se donne même pas la peine de démarrer avant d’accélérer » dit à raison Galera.
Pour autant, comme dans les précédents romans d’Edyr Augusto, aussi inconfortable soit-elle, la violence de Pssica n’est ni gratuite, ni une manière de voyeurisme et elle tient autant aux actes décrits qu’à l’écriture en rafale de l’auteur.
De tout cela il ressort, comme dans Belém, Moscow et Nid de vipères, une description sans fard de la violence sociale qui règne là.
De la manière dont la corruption qui gangrène monde politique et administration a fini par imposer un nouvel ordre social que la population a dû se résigner à accepter car, là où l’État n’est plus présent, c’est ce nouvel ordre qui semble assurer aux yeux des gens un semblant d’espoir d’avoir quelque chose sur la table le lendemain.
Augusto, sans se faire lénifiant, par la simple et crue description des avanies qui s’abattent sur ses personnages, laisse deviner les ressorts de cet état de fait, la précarité de l’équilibre qui se met en place et la manière dont tout peut basculer l’espace d’un instant.
Et encore une fois il montre comment ce sont les plus pauvres et les femmes qui paient le plus lourd tribut, simples marchandises dans un monde totalement dérégularisé dont profite par ailleurs le riche voisin.
Les pages consacrées à la Guyane française sont d’ailleurs tout aussi violentes que celles qui se déroulent au Brésil et, là encore, représentent une charge salutaire.
Une fois encore, Edyr Augusto impressionne par la brutalité de son écriture et la rage qui émane de ses histoires.
Féroce et engagé, Pssica vous laisse groggy.
_________________ « Il vaut mieux cinq mille lecteurs qui ne vous oublieront plus jamais à des centaines de milliers qui vous auront consommé comme une denrée périssable. » Jérôme Leroy
Posté le: Sam Fév 25, 2017 3:19 pm Sujet du message:
>> La chronique de Jean-Marc Laherrère sur Actu du Noir :
Citation:
L’enfer vert amazonien
C’est déjà le quatrième roman du brésilien Edyr Augusto traduit en France chez Asphalte.
Avec Pssica, on reste dans un Brésil amazonien extrêmement violent.
Nous sommes du côté de Belém.
Suite à une vidéo où on la voit faire une fellation à son copain, Janalice, quatorze ans est envoyée par ses parents chez sa tante.
Quelques jours plus tard, elle est enlevée dans la rue et disparaît.
Un ancien flic, ami du père, part à sa recherche sur le fleuve.
Il se retrouve dans une zone hors de toute loi, livrée à la contrebande, à la prostitution et à tous les trafics possibles, de et vers la Guyane française proche.
Un lieu où les bandes et les politiciens pourris jusqu’à la moelle font régner leur loi.
Attention, c’est violent, sans concession et les rudes aspérités du roman ne sont adoucies par rien.
Pas de personnage auquel se raccrocher, ou si peu, pas de scènes de repos.
C’est court, sec et ça secoue.
Comme dans les autres romans de l’auteur, les protagonistes sont bourreaux ou victimes, parfois les deux.
Les pires (et il y en a beaucoup), ne semblent avoir aucune valeur morale, aucun frein, ils ne suivent que leurs désirs.
S’ils veulent quelque chose, ils le prennent, sauf si c’est quelqu’un de plus fort qu’eux qui l’a.
La corruption est générale, la loi du plus fort la seule règle.
Et surtout, n’attendez pas le happy end.
Pour les amateurs de noir très noir, après, prévoyez un truc un peu plus riant.
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Posté le: Mer Mar 08, 2017 10:54 am Sujet du message:
>> La chronique de Christophe Laurent, de Corse Matin, sur The Killer inside Me :
Citation:
Pssica : dans les méandres sanglants de la traite des blanches
Auteur d'un Brésil anti-samba, anti-Copacabana, anti-JO, Edyr Augusto montre un pays sans foi ni loi, un western brutal, ultra-violent.
Avec Pssica (malédiction), il se met dans les pas de Janalice, jeune fille de 14 ans.
Son petit ami l'a filmé en train de lui faire une fellation, la vidéo a tourné dans tout le collège, le principal a convoqué les parents, le père effondré a envoyé Janalice chez une tante.
Là-bas, la petite ado déboussolé se fait prendre en main par une toxico, puis se fait kidnapper.
Son long calvaire d'esclave sexuelle dans les bouges mais aussi les fêtes bourgeoises de la région de Bélem commence.
Un parcours comme autant de "stations" du Christ sur le Chemin de croix, avec un gros lard plein aux as, dans une orgie de rupins, dans un bordel de Cayenne...
Sa peau claire, ses cheveux blonds, en font l'attraction de tous les pervers.
Entre-temps, Amadeu, ancien flic, ami de la famille, part à sa recherche.
Mais elle va aussi croiser Portuga, avide de vengeance depuis que sa femme a été découpée par des voleurs.
Parmi lesquels Prea, qui se fait hypnotiser par la beauté de Jane.
Pour son quatrième roman publié en France, Edyr Augusto ne relâche en rien son étreinte sur la région qui l'a vu naître et sur son public qui la découvre.
Avec son style inimitable, sans guillemets pour les dialogues, sans retour à la ligne, pour bien perdre son lecteur dans les méandres de sa prose.
Pour comprendre la littérature d'Augusto, il faut d'ailleurs se plonger cinq minutes dans les entrelacs de la géographie de cette région de Belem.
Une Nature faite de fleuves boueux, d'estuaires, de rivières, de jungle et de petites villes abandonnées de tous.
Ils sont là les premiers méandres.
L'urbanité n'a rien à faire ici.
Et la civilisation, pas grand chose.
« On vend des jeunes filles. Il y a même des parents qui vendent leurs hijas pour avoir de quoi se nourrir. »
C'est le lieu de tous les trafics.
On l'a déjà vu dans Moscow et surtout Nid de vipères du même auteur.
Avec Pssica, outre sa violence crue, débordante, où non seulement les coups de machette pleuvent mais où, également, tous les espoirs ne sont pas permis, Augusto s'amusant avec ses « héros » masculins, dans Pssica donc, il est surtout question de la traite des blanches.
Trafic monstrueux, à base d'enfants, de vierges parfois, dans lequel même les autorités politiques, toutes puissantes grâce à une über corruption, trempent.
Oui, Pssica est parfois dégueulasse comme un fait divers peut l'être, mais il rappelle aussi à quel point les héros, ça n'existe plus, que l'individualisme, le libéralisme, la consommation y compris du sexe et donc de la femme ont largement gagné, au moins dans cette partie du monde.
Une fois de plus, Augusto donne des cauchemars, mais lui n'a pas besoin de serial killer, de menaces terroristes, de bombes, il prend juste des hommes.
Et la dimension politique, au sens noble du terme, de l'oeuvre d'Edyr Augusto saute encore un peu plus aux yeux.
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Brésil. Belém. Delta de l’Amazone.
Janalice est punie par ses parents.
Elle ira chez sa tante.
La ravissante adolescente est vilaine.
Trop ravissante car elle attire les vautours.
Kidnappée, elle va agrandir le cheptel des marchands de chair.
Amadeu reprend du service et va mener l’enquête.
C’est au cœur du pire, là où tous les trafics sont gérés par des hommes sans foi ni loi, qu’il va rencontrer l’horreur, la malédiction.
Celle-ci semble pénétrer et roder dans ces contrées comme s’immisce la poisseuse puanteur de la putréfaction pour ne jamais nous quitter.
L’impensable y côtoie l’abominable et toute sa cohorte de able.
Malédiction innommable.
Images insoutenables, épouvantables.
C’est la pssica.
Nous découvrons l’auteur avec ce récit - des lacunes à combler car nous avons vécu une intense expérience.
Edyr Augusto dissèque.
Une autopsie sociale.
Il est nécessaire d’admettre cet état de fait pour faire fuir une perception voyeuriste qui occulterait l’engagement de l’auteur.
Car plonger dans cet enfer provoque un malaise.
On ne peut en sortir intact.
Quand la virginité est heurtée, meurtrie, mutilée.
Quand la sauvagerie est la règle.
Quand l’ignominie s’expose.
Le vieux flic, Jane - Janalice n’existe plus -, Portuga, Preá.
Certains cherchent, un autre fait des affaires, une autre succombe.
La femme de Portuga a été assassinée, démembrée.
Il part sur une piste qui, comme Amadeu, va le conduire en enfer.
Sur les lieux des crimes, des magouilles où Preá est actif mais lui aussi n’est pas épargné.
A Malin, Malin et demi.
Or, prostitution d’enfants, drogue, piraterie.
Pour mener à bien ces divers trafics, le Pouvoir est conciliant.
Le Pouvoir aime les jeunes filles.
Il ferme les yeux et ouvre sa braguette.
Il peut également libérer des coupables.
Dans ce delta de l’Amazone on navigue sur un flot de terreur, de menaces.
Quand l’inhumanité prend racine seule la mort est enfin libératrice.
Parfois, l’épouvante prend fin en Guyane.
Parfois, un semblant d’espoir semble naître.
On respire. Enfin, dans les dernières lignes.
Après une course effrénée en apnée.
Car l’auteur a banni l’interruption.
Les cent-quarante pages sont sans tronçon.
La scie attaque la chair, les âmes, et ne s’arrête que lorsque les membres sont à terre, les cerveaux dévastés.
Il fallait ça.
Il fallait des dialogues intégrés dans le texte.
Il fallait intégrer le Mal pour comprendre.
Sentir la morsure des dents de la lame.
Pour ne plus continuer à se convaincre que ce n’est pas un mauvais rêve.
Qu’il déteste ce qu’il expose sur son étal.
Avec son style.
Sans outrance tapageuse, démonstration bruyante.
L’auteur accuse.
Nous n’avons été que très rarement confrontés à un tel état de violence.
En s’engageant dans cette voie, Edyr Augusto prouve que sa détermination et son talent peuvent forcer les barrières mentales.
Le lecteur pourra s’en convaincre.
Parce que Pssica est souvent insoutenable, parce qu’il sort de la norme, parce que son auteur témoigne, il faut le lire.
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Posté le: Mer Avr 19, 2017 9:42 pm Sujet du message:
>> La chronique de Pierre Faverolle sur Black Novel :
Citation:
Pssica d’Edyr Augusto
J’avais été enchanté, effaré par Nid de vipères, un roman court et violent, autopsiant la société brésilienne et la corruption généralisée, à travers une histoire de vengeance terrible.
Et si l’histoire était marquante, le style si particulier fut pour moi une révélation.
Pssica (qui veut dire Malédiction), pour moi, va encore plus loin, et fait plus mal.
Janalice est une collégienne comme les autres.
Et pourtant, ce jour là est pour elle comme l’ouverture d’une porte vers l’enfer.
Sa beauté, sa couleur de peau blanche en font une des vedettes du lycée.
Quand elle est convoquée par la directrice, c’est pour apprendre que son petit ami Fenque a filmé leurs ébats sexuels et les a mis sur un réseau dit social.
La directrice lui demande de partir et de revenir avec ses parents.
Quand elle arrive chez elle, elle en parle à sa mère, qui est effondrée.
La réaction du père est plus extrême, il lui demande de partir de la maison et il la jette dehors.
Elle trouve refuge chez une amie, et essaie de tourner la page.
Mais en se promenant dans la rue, elle est enlevée dans une camionnette par deux hommes.
Le père de Janalice a des remords.
Il fait appel à Amadeu, un policier à la retraite, pour retrouver sa fille.
On va suivre aussi beaucoup d’autres personnages dans ce roman.
Manoel Tourinhos a fui son pays d’origine l’Angola quand la révolution a éclaté et a rejoint l’île de Marajo, où il ouvre un commerce avec sa femme Ana Maura.
Une bande de délinquants débarque et tue atrocement sa femme.
Prea a pris la suite de son père à la tête du gang de tueurs.
Leur activité va du vol au meurtre, du trafic de drogue à la corruption.
Prea est un des exemples de chefs de gangs dans un milieu ultra-violent.
Comme je l’ai dit pour le précédent roman, le style du roman est particulier, complètement personnel.
Là où dans le précédent roman, le lecteur devait emboiter les pièces pour construire l’histoire, on se retrouve ici avec une histoire plutôt linéaire, ou plutôt plusieurs histoires en parallèle.
Et dans ce cas là, son style fait mouche.
Les phrases sont courtes et frappent le lecteur.
Les dialogues ne sont pas séparés, ils sont inclus dans un même paragraphe, et le lecteur n’a aucune difficulté à s’y retrouver.
En fait, on a plutôt l’impression que Edyr Augusto nous prend la tête entre ses mains et nous la secoue bien fort.
Car la situation est proprement hallucinante, voire déprimante, nous montrant des gens communs aux mains de tueurs qui n’ont aucune limite.
Les scènes sont éloquentes, l’auteur ne nous cachant rien.
Il faut s’attendre à des scènes crues et être préparé à ce voyage en enfer.
Car les victimes vont s’amonceler et le lecteur n’en sortira pas indemne.
Si on peut qualifier ce roman de roman noir, c’est aussi et surtout un roman de dénonciation.
Car à travers la galerie de personnages, tous personnage principal de l’histoire à un moment donné, Edyr Augusto livre un témoignage éloquent sur l’état de son pays, aux mains de tueurs sans états d’âmes, inhumains jusqu’au bout des ongles, de tous les trafics qui nourrissent ces gangs, de l’argent qui va remplir les poches des politiciens.
Et la morale, dans tout cela ?
J’ai bien peur qu’elle ait été enterrée avant le début de ce roman.
Avec ce roman, Edyr Augusto va encore plus loin dans la dénonciation et la dérive de son pays.
Il ne met pas de gants, et ne nous épargne rien.
C’est un roman fort, un roman coup de poing, qui mérite d’avoir un large écho pour que son message porte.
Pssica est un roman dur, âpre, dans lequel on ne trouvera aucune rédemption, aucun espoir, aucun avenir.
Et peut-être faut-il que l’on se prenne des claques dans la figure pour nous en rendre compte ?
Vous l’avez compris, il faut absolument lire ce roman hallucinant.
_________________ « Il vaut mieux cinq mille lecteurs qui ne vous oublieront plus jamais à des centaines de milliers qui vous auront consommé comme une denrée périssable. » Jérôme Leroy
Résolument orientées vers les auteurs hispaniques, la maison d’édition Asphalte nous a permis de découvrir des auteurs détonants comme l’espagnol Carlos Zanón (J’ai été Johnny Thunder), le chilien Boris Quercia (Les Rues De Santiago - Tant De Chiens) et le brésilien Edyr Augusto qui a pris l’habitude de situer ses romans dans l’état du Pará où il vit.
Trop de sorties, trop de nouveautés et autres mauvaises excuses, il aura fallu attendre le quatrième opus de l’auteur, intitulé Pssica, pour que je découvre l’univers extrêmement violent d’Edyr Augusto qui dépeint la corruption qui gangrène cette région où règne un climat de déshérence sociale laissant la place à des situations d’une insoutenable abjection.
Après avoir filmé leurs ébats, le petit ami de Janilice a décidé de diffuser la vidéo qui se retrouve sur tous les portables des camarades d’école de la jeune fille. Un scandale que ses parents ont de la peine à supporter, raison pour laquelle ils expédient la belle adolescente, à peine âgée de 14 ans, chez sa tante à Belém. Mais la colère fait rapidement place au désarroi lorsqu’ils apprennent que Janilice s’est fait kidnapper dans la rue, en plein jour. Aux portes de la région amazonienne, l’événement est loin d’être isolé. Les forçats de la jungle sont avides de chairs fraîches qui alimentent les bordels. Ne pouvant compter sur les autorités locales corrompues, le père de Janilice supplie Amadeu, un flic retraité, de se lancer à la recherche de la jeune fille. De Belém à Cayenne, débute alors un périple halluciné aux confins de la jungle amazonienne dans laquelle on croise des pirates du fleuve barbares, des garimpeiros brutaux et des macros cruels qui végètent dans un environnement où la vie humaine n’a que bien peu de prix.
Ce qu’il y a de déroutant avec un romans comme Pssica, c’est que l’auteur ne s’embarrasse d’aucune fioriture aussi bien dans le texte que dans sa mise en forme, à l’instar des dialogues qui s’enchaînent sans le moindre saut de page en procurant ainsi une sensation de fulgurance encore bien plus intense pour un ouvrage dépourvu du moindre temps mort.
Afin d’achever le lecteur, il faut prendre en compte le fait que Pssica est exempt de toute espèce de transition et se dispense de descriptifs servant à magnifier un environnement pourtant peu ordinaire, dans lequel évoluent des personnages aux destinées plus qu’aléatoires.
On se retrouve ainsi avec un texte au travers duquel émane une violence quotidienne, d’une rare cruauté puisqu’elle touche particulièrement des enfants asservis à la concupiscence d’adultes dépourvus du moindre scrupule.
Âpres et sans fard, les sévices que dépeint Edyr Augusto suscitent un sentiment de malaise parce qu’ils s’inscrivent dans un réalisme qui fait frémir.
Mais loin d’être esthétique ou complaisante, la crudité des scène ne fait que souligner la thématique abordée par l’auteur, en dépeignant la corruption institutionnalisée dans une région où l’absence de règles et de contrôles, qu’ils soient formels ou informels, ne font que renforcer ce sentiment de sauvagerie qui règne tout au long d’un récit sans concession.
Ainsi les actes brutaux, qui s’enchaînent tout au long de cet ouvrage à l’écriture sèche et dépouillée, ne deviennent plus qu’une espèce de résultante mettant en lumière cet univers sans foi ni loi où l’expression « loi de la jungle » s’éloigne de son sens figuratif pour prendre une dimension plus littérale.
Avec Pssica, nous suivons donc le parcours de Janilice dont le destin prend la forme d’une espèce de malédiction (Pssica) donnant ainsi son titre au roman.
Comme une colonne vertébrale dramatique, les péripéties de la jeune adolescente, soumise aux affres des viols à répétition, de la prostitution forcée et dont la tragique beauté va attiser toutes les convoitises, révèlent les sombres desseins des autres protagonistes du roman qui, tour à tour, semblent comme envoûtés à la simple vue de cette jeune fille au charme ravageur.
C’est un peu le cas pour Amadeu, cet ancien flic qui s’engage sans grande conviction dans un périple aux résultats incertains, mais dont les recherches vont virer à l’obsession à mesure qu’il remonte les travées du fleuve qui s’enfonce dans la jungle.
Ancien militaire angolais, Manoel Toreirhos pensait avoir trouvé refuge au fin fond de cette forêt équatoriale jusqu’à ce qu’il croise le chemin de Preá, membre d’une bande de pirates qui sévissent dans l’estuaire.
Une escalade de vengeances poussent les deux hommes à se confronter dans une succession de règlements de comptes qui virent aux carnages en laissant sur le carreau un bon nombre de leurs compères respectifs.
Dans ce monde cruel où chacun rend justice à sa manière, les destins s’entremêlent au gré de rebondissements dont les circonstances aussi brutales qu’abruptes remettent en cause tous les parcours des différents acteurs du roman.
A l’image d’une fièvre malsaine, qui brouille l’esprit, Pssica ensorcellera le lecteur pour l’emmener dans cet univers de violence qui agit comme une véritable catharsis afin d’offrir une possibilité de rédemption qui se révélera bien aléatoire.
Puissant, troublant et déroutant.
_________________ « Il vaut mieux cinq mille lecteurs qui ne vous oublieront plus jamais à des centaines de milliers qui vous auront consommé comme une denrée périssable. » Jérôme Leroy
Posté le: Lun Mai 01, 2017 4:20 pm Sujet du message:
>> La chronique-vidéo de Tara Lennart pour Bookalicious :
_________________ « Il vaut mieux cinq mille lecteurs qui ne vous oublieront plus jamais à des centaines de milliers qui vous auront consommé comme une denrée périssable. » Jérôme Leroy
REPLAY - Dans ce polar, l'auteur brésilien raconte la descente aux enfers d'une jeune fille entraînée vers la prostitution, et l'enquête du policier qui cherche à la retrouver.
Pssica… autrement dit : la malédiction.
Ce coin sauvage du Brésil, dans l'État de Para, n'en manque pas : misère générale, environnement hostile, corruption massive, trafics généralisés et délinquance ultra violente.
C'est dans ce paradis qu'habite la ravissante Janalice, 14 ans.
C'est une beauté, à la vie sexuelle déjà épanouie.
Son petit ami trouve amusant de diffuser leurs ébats sur Internet.
Cela vaut l'exil à Janalice : à Belem précisément, chez sa tante qui ne sait que faire de la jeune fille.
À force de traîner dans les rues, elle attire les convoitises.
Kidnappée, la voilà aux mains des marchands de chair humaine.
Elle devient Jane, la prostituée à la peau claire que se disputent tous les bordels du nord-est brésilien.
Son père est au bord du suicide.
Amadeu, ami de la famille et flic en retraite promet de retrouver l'adolescente et de la ramener chez elle.
Ainsi débute son voyage personnel au bout de l'enfer, qui le mènera jusqu'en Guyane française… pour un résultat à découvrir à l'issue de ce bref et terrible polar de 140 pages.
L'un des plus violents lu cette année sans doute.
Mais rien n'est gratuit dans Pssica.
Quand la loi disparaît, alors les hommes redeviennent des bêtes et les femmes du bétail sexuel.
Surtout, il y a le style du roman : dense et percutant, sans aucune fioriture, des dialogues enchevêtrés où l'on craint au début de se perdre.
Mais non.
Ça se lit très bien, et vous n'avez jamais rien lu de tel.
C'est tout simplement magistral.
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