Posté le: Mer Déc 30, 2015 8:22 pm Sujet du message:
chouchou a écrit:
Dernier point un livre n'a pas nécessairement besoin d'un but ou de valeurs collectives sociétales.
Je suis complètement d'accord sur ce point. Combien de livres, de nos jours, sont écrits dans le seul but de divertir, ou de captiver et faire frémir leurs lecteurs pour les thrillers, etc ?
Outre le fait qu'un écrivain n'a pas à se "justifier" d'écrire une fiction, quelle qu'elle soit. D'ailleurs, je pense que beaucoup d'entre eux, en choisissant puis en écrivant leurs romans, ne sont pas forcément conscients eux-mêmes de ce qu'ils expriment ou cherchent à exprimer à travers leurs écrits.
Je me souviens d'avoir visionné la vidéo d'une rencontre entre plusieurs auteurs étrangers - dont Donald Ray Pollock - et des journalistes littéraires lors d'un festival en France, peu de temps après la publication de Le Diable, tout le temps. Michel Abescat, à chaque fois que la parole revenait à Pollock, ne cessait de lui poser des questions sur ce qu'il avait voulu exprimer à travers tel ou tel sujet qu'il avait abordé dans son roman, et à chaque fois D.R. Pollock ne lui répondait que par : "J'ai simplement voulu écrire un bon bouquin, que le lecteur ne lâcherait pas."
Du coup, j'étais moi-même frustré de ces réponses, mais Pollock n'avait pas varié d'un iota.
À l'inverse, combien de fois j'ai pu entendre ou lire des écrivains parler de ce qu'ils avaient écrit, de ce qu'ils avaient voulu exprimer, des références ou intentions dont ils disaient avoir parsemé leur roman, alors que moi qui avait lu leur livre en question, j'avais vraiment impression qu'ils en rajoutaient, ou cherchaient à enrober leur oeuvre d'une dimension qu'elle n'avait pas...
Et justement, pour Paola Barbato je pense que son roman À mains nues est tout sauf une lubie ou un "coup" qu'elle aurait voulu faire. Il suffit d'ailleurs de lire le roman qu'elle a écrit ensuite, Le Fil rouge, pour y retrouver, dans une histoire, un cadre et une ambiance pourtant radicalement différents, les mêmes thématiques, la même dissection de la psychologie de ses personnages par rapport à la mort, au deuil, à la manipulation, au besoin - ou non - de vengeance, etc.
Après, c'est assez difficile d'expliquer ou d'en dire plus sans spoiler, et peu importe de toute façon que d'autres se soient peut-être déjà questionnés sur une partie des mêmes thématiques (J. Littell dans Les bienveillantes n'était pas non plus le premier, loin de là). _________________ « Il vaut mieux cinq mille lecteurs qui ne vous oublieront plus jamais à des centaines de milliers qui vous auront consommé comme une denrée périssable. » Jérôme Leroy
Dernière édition par norbert le Ven Fév 03, 2023 2:18 am; édité 1 fois
Posté le: Jeu Déc 31, 2015 2:22 pm Sujet du message:
D'ailleurs, à propos de Paola Barbato et de son style, je reproduis ci-dessous la chronique d'Eric Libiot dans L'Express pour Le Fil rouge ( on en parle ici ), qui résume parfaitement ce que je pense :
Paola Barbato a écrit un grand livre : Le Fil rouge.
« Magnifique » serait le mot exact, d'ailleurs, n'était l'ambiance poisseuse et transpirante du roman.
Une encre noire.
De celle qui peint les ombres et la fragilité des hommes.
Le polar a finalement toujours été au centre du monde en ce qu'il épouse les mouvements de l'époque et les comportements de ceux et celles qui essaient d'avancer sans trébucher.
Que sait-on de la façon dont on agirait dans des situations singulières ?
Pas grand-chose, sans doute.
L'art en général, la littérature et le polar en particulier sont là pour froisser ce qu'il y a de raisonnable et pointer ce qui n'est pas forcément avouable.
Cela pour dire que Paola Barbato a écrit un grand livre : Le Fil rouge.
« Magnifique » serait le mot exact, d'ailleurs, n'était l'ambiance poisseuse et transpirante du roman.
Un style superbe, à la fois simple et poétique
C'est l'histoire d'un homme, Antonio Lavezzi, qui marche sans vie depuis que sa fille de 13 ans a été assassinée.
Sa femme l'a quitté, son boulot ressemble à un écran de fumée, ses insomnies le noient dans une nuit profonde.
Le coupable court toujours.
Jusqu'au jour où un homme demande à Lavezzi son aide pour éliminer des criminels impunis.
Que faire ?
Rien, évidemment.
Personne de sensé ne va se mettre à tuer.
Et pourtant.
Et si c'était, pour Lavezzi, l'occasion de retrouver l'assassin de sa fille...
Découverte en France avec À mains nues, Paola Barbato tisse une intrigue qui déploie du romanesque et cisèle les contours psychologiques d'un homme.
L'alternance entre l'un et l'autre, toujours à bonne distance et dans un équilibre parfait, est nourrie par un style superbe, à la fois simple et poétique, invisible et très présent.
Toutes ses ruptures et ses changements d'ambiance font du Fil rouge un roman exemplaire et fascinant.
Modeste et ambitieux.
Qui avance à pas comptés.
Qui touche au plus profond parce qu'il agite des fantômes qu'on voudrait ne jamais voir éveillés.
C'est aussi ça, la grandeur du roman noir lorsqu'il est porté si haut.
_________________ « Il vaut mieux cinq mille lecteurs qui ne vous oublieront plus jamais à des centaines de milliers qui vous auront consommé comme une denrée périssable. » Jérôme Leroy
Posté le: Lun Jan 04, 2016 12:29 am Sujet du message:
>> Le commentaire de Gamille67 sur PP :
Citation:
Incroyable !
J'ai rarement ressenti autant d'émotions en lisant un bouquin, et j'ai rarement lu un roman de près de 500 pages en aussi peu de temps.
Je ne sais pas citer un autre livre qui m'a fait cet effet.
Je pense par contre à certains films, où je suis sorti du ciné avec les mêmes sentiments de plaisir d'avoir vu quelque chose d'exceptionnel, un peu malsain, mais très fort : Orange mécanique, Midnight express, Shining,...
A ne pas mettre entre toutes les mains.
9/10
_________________ « Il vaut mieux cinq mille lecteurs qui ne vous oublieront plus jamais à des centaines de milliers qui vous auront consommé comme une denrée périssable. » Jérôme Leroy
Dernière édition par norbert le Ven Fév 03, 2023 2:19 am; édité 1 fois
Posté le: Mar Jan 05, 2016 11:12 am Sujet du message:
en tout cas voici un livre qui suscite un débat intéressant...
je ne sais plus si j'ai envie de le lire mais je vais le lire quand même, rien que pour avoir mon avis sur la question...
et dire que jusqu'à aujourd'hui j'ai toujours évité Mo Hayder parce qu'on me disait que c'était trop violent... mais ça n'a peut-être rien à voir... peux pas dire parce que je n'ai lu aucune de ces 2 auteures. _________________ Sometimes the obvious occludes the truth. And sometimes things are exactly as they appear.
Saints of NY _ R. J. Ellory
Posté le: Mar Jan 05, 2016 11:31 am Sujet du message:
Alice a écrit:
Ironheart a écrit:
Je vais bientôt le commencer et là, avec vos critiques, je suis moyennement motivée...
Je suis également curieuse comme le Juge de connaitre ton avis Ironheart ...
Même si le Juge n'a pas encore voté, j'ai compris ce qu'il en pensait...
Le mieux est de tenter le coup et de te faire toi-même ton propre avis !
Oui, c'est vrai que c'est violent, mais ce n'est pas "gore" non plus, il n'y a pas de descriptions sanglantes complaisantes comme on peut en trouver dans d'autres thrillers.
Et puis de toute façon si vraiment tu sens que c'est trop violent pour toi, tu arrêtes ta lecture ! _________________ « Il vaut mieux cinq mille lecteurs qui ne vous oublieront plus jamais à des centaines de milliers qui vous auront consommé comme une denrée périssable. » Jérôme Leroy
Age: 36 Inscrit le: 06 Oct 2005 Messages: 11460 Localisation: Au bout du monde
Posté le: Mar Jan 05, 2016 11:37 am Sujet du message:
J'ai dépassé la centaine de pages et j'ai un ressenti particulier.
Ce n'est vraiment pas ce que j'ai envie de lire en ce moment, que ce soit du point de vue du sujet ou de la violence qui en découle, mais je ne peux pourtant m'empêcher de vouloir connaître la suite, notamment parce que "l'identification" à Davide fonctionne bien.
Par contre, il y a des éléments qui passent plus ou moins mais que je trouve très gros si l'on y pense bien
Spoiler:
surtout le fait que "l'organisation" derrière ces combats parvienne à enlever autant de gens sans se faire avoir ou au minimum créer une psychose dans le pays, car le rythme des rapts a l'air assez soutenu.
_________________ Quand je pense à tous les livres qu'il me reste à lire... J'ai la certitude d'être encore heureux.
Jules Renard (1864-1910)
Posté le: Mar Jan 05, 2016 11:56 am Sujet du message:
Hoel a écrit:
Par contre, il y a des éléments qui passent plus ou moins mais que je trouve très gros si l'on y pense bien
Spoiler:
surtout le fait que "l'organisation" derrière ces combats parvienne à enlever autant de gens sans se faire avoir ou au minimum créer une psychose dans le pays, car le rythme des rapts a l'air assez soutenu.
En réalité pas tant que ça
Spoiler:
si on considère par exemple les milliers de personnes disparues en France, dont les cas sont "jugés inquiétants", mais qui ne sont jamais retrouvées.
Si Davide était un ado lors de son enlèvement, il me semble que la plupart de ses collègues parmi les "sous-chiens" sont majeurs. Et la disparition de personnes majeures ne donne plus systématiquement lieu à des investigations.
Si, en plus, on tient compte du milieu social très pauvre et précaire auquel la plupart appartient dans le roman, avec souvent des passés très lourds au niveau délinquance, ça reste parfaitement plausible malheureusement.
_________________ « Il vaut mieux cinq mille lecteurs qui ne vous oublieront plus jamais à des centaines de milliers qui vous auront consommé comme une denrée périssable. » Jérôme Leroy
Posté le: Mar Jan 05, 2016 5:47 pm Sujet du message:
J'ai exactement le même ressenti qu'Hoel pour le moment. Le poisson est rapidement ferré, on est pris dans l'histoire et on ne veut pas lâcher le bouquin parce qu'on n'a pas envie de laisser Davide à son triste sort.
Pour le reste, c'est vrai que c'est assez sordide. Ceci dit, OK avec Norbert, l'auteure garde une retenue sur le descriptif des scènes violentes et en élude même quelques unes. Ouf ! _________________ “Si vous possédez une bibliothèque et un jardin, vous avez tout ce qu'il vous faut".
Cicéron.
Posté le: Sam Jan 09, 2016 11:25 am Sujet du message:
Hoel a écrit:
Après avoir achevé
Et voilà notre Hoel, qui repart, comme ça, sans aucun mot sur son ressenti, même à chaud, après avoir refermé la dernière page de ce livre diabolique ! _________________ La vie ne devrait consister qu'à trouver les bons mots au bon moment. (Tété, Emma Stanton, 2003).
Age: 36 Inscrit le: 06 Oct 2005 Messages: 11460 Localisation: Au bout du monde
Posté le: Sam Jan 09, 2016 12:03 pm Sujet du message:
Dérangeant du début à la fin.
C'est un thriller très efficace (pageturner redoutable) mais ça ne correspond plus à ce que je cherche à lire donc ça ne sera pas une note exceptionnelle (7?). D'ailleurs je le savais rien qu'en lisant le résumé et sans le Prix PP jamais je ne l'aurai lu.
Trop de sang, trop de violence. Et quel besoin de rajouter de l'ignoble à l'horreur alors que c'était déjà bien assez crade comme ça ?
Je pense à l'histoire
Spoiler:
des viols filmés et autres snuff movies.
J'ai noté une phrase p.429 qui me semble représentative de ma lecture.
Citation:
"Pendant deux jours, à part deux morts, il ne se passa rien."
En gros tout le monde crève tout le temps, il ne se passe pas dix pages sans qu'il y ait un mort mais ça devient banal, limite ça ne nous fait plus ni chaud ni froid.
Si quelqu'un a le courage de faire le calcul du nombre de morts et de le ramener au nombre de pages je serai curieux de connaître le ratio.
J'essaie d'en reparler plus en détail prochainement. _________________ Quand je pense à tous les livres qu'il me reste à lire... J'ai la certitude d'être encore heureux.
Jules Renard (1864-1910)
Posté le: Sam Jan 09, 2016 12:37 pm Sujet du message:
Hoel a écrit:
Dérangeant du début à la fin.
C'est un thriller très efficace (pageturner redoutable) mais ça ne correspond plus à ce que je cherche à lire donc ça ne sera pas une note exceptionnelle (7?). D'ailleurs je le savais rien qu'en lisant le résumé et sans le Prix PP jamais je ne l'aurai lu.
Trop de sang, trop de violence. Et quel besoin de rajouter de l'ignoble à l'horreur alors que c'était déjà bien assez crade comme ça ?
Je pense à l'histoire
Spoiler:
des viols filmés et autres snuff movies.
C'est exactement mon ressenti !!!
Du coup, j'oscille entre 4 (très moyen, du fait de cette orgie de violence) à 9 (excellent, parce que ça se lit très vite et que la fin... whouah !). C'est pour ça que je ne l'ai toujours pas noté. _________________ La vie ne devrait consister qu'à trouver les bons mots au bon moment. (Tété, Emma Stanton, 2003).
Posté le: Lun Jan 11, 2016 7:04 am Sujet du message:
En fait, on ne ressent aucun plaisir à lire ce roman et en même temps, on y est scotché. Il est très attractif-répulsif donc pas facile de le noter, effectivement.
(Pour l'instant, je n'en suis qu'au tiers). _________________ “Si vous possédez une bibliothèque et un jardin, vous avez tout ce qu'il vous faut".
Cicéron.
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