Jean-Christophe Grangé — Polars Pourpres

[Anonyme 5]

Surpris par la pluie, Yvan s’abrita sous son attaché-case et accéléra l’allure en râlant. Tandis qu’il empruntait sa rue, il vit une forme étendue sur le sol, à peine éclairée par la lumière vacillante d’un réverbère. En s’approchant, il s’aperçut qu’il s’agissait d’un homme, couché sur le dos. Une écharpe en laine cachait son visage.

— Monsieur ? lança Yvan d’une voix craintive.

Comme l’homme ne répondait pas, il se baissa et ôta l’écharpe lentement. Il se figea en découvrant la figure d’une pâleur mortelle. Ce visage était en tous points identique au sien...

Troublé, Yvan se redressa en sursaut et inspecta les alentours. C’est alors qu’une immense douleur irradia sa poitrine. Par réflexe, il porta ses mains sur son torse, à l’endroit même où une balle venait de le traverser de part en part.
Il leva les yeux vers son adversaire. En le reconnaissant, il parut surpris, mais esquissa un sourire cynique. C’était donc lui.
Yvan s’écroula sur le sol, et malgré ses suffocations, il s’adressa à cet homme, debout devant lui, qui venait de tuer son frère, et qui venait de le tuer, lui aussi.

« Maintenant, je sais que c’est toi. Mais je ne sais toujours pas pourquoi …
- Te moques-tu ? lui répondit l’assassin. Rien, je n’étais rien, et je ne pouvais rien faire qui ne soit pas comparé avec vos choix. Les deux, vous étiez si complices, et moi, je ne le supportais pas. Tu comprends ? Je ne pouvais pas exister, vous me rejetiez, et pourtant je n’existais qu’à travers vous. »
L’homme prit le temps de ravaler sa rancœur avant d’ajouter :
« Désormais, je suis unique. Tu vois, j’étais prêt à payer le prix fort pour ma liberté. »

Yvan ferma les yeux. Tout était fini. Il avait passé la plus grande partie de sa vie à rechercher la vérité, et maintenant, elle apparaissait. Ultime. Yvan accepta l’idée de mourir. Car si, pour vivre, il fallait pardonner à cet homme, alors non, il préférait renoncer.

La vérité… Leur frère triplé n’avait jamais disparu. Yvan l’avait toujours ressenti. Martin aussi. Et ensemble, ils avaient cherché à comprendre. Il savait, maintenant. Son frère s’était éloigné pour mieux préparer ce qu’il considérait sûrement comme une vengeance méritée.

Mais quel avait été leur crime, à part d’être frères ?

Yvan ouvrit une dernière fois les paupières. Il vit l’homme, debout, son frère Georges, comme il l’était réellement. Un homme amer, rongé par la jalousie, et totalement égoïste. Il tourna alors la tête vers la figure exsangue de son autre frère. Martin. Il avait toujours été si heureux de vivre, généreux, mais aussi tellement naïf.
Et lui-même ? Il ne s’interrogea pas sur sa place dans le trio. Cela n’avait plus aucune importance.

Il ferma les yeux.




La caméra termina la scène par un gros plan sur le visage de l’acteur, debout, une expression sombre dans le regard.

« Coupé » hurla le réalisateur.

L’acteur quitta le studio le cœur léger. Enfin, le passage le plus difficile à tourner était passé.
Cela n’avait pas été évident de faire un scénario de son histoire, tout en évitant soigneusement de faire peser des doutes quant à un quelconque vécu. Mais maintenant, il était assez content du résultat… Et quand un journaliste lui demandait d’où venait son inspiration, il se contentait de répondre en souriant, plus sincère que jamais : « c’est un secret que personne ne doit découvrir ».






C'est la première fois que je participe à un concours de nouvelle. Je pars en vacances demain, mais je lirai les autres nouvelles, et verrai les résultats à mon retour à la mi-août

[frog]

j'aime bien celle là aussi

[Léo]

Vi, moi aussi!!!

[luce]

moi j'ai cru que je rêvais avec la chute !

comment peut on penser à un truc pareil ?
génial, même si décevant au premier abord...
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Craignez la fureur d'un homme patient

John Dryden

[Memess]

La chute est excellente !
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Polars Addict : Chroniques des littératures de genre
So many books, so little time...